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J'étais une gamine qui crevait d'amour. (#1 - Nose Candy.)

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Pablo_Aguass
Svetlana Pavlenko
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Message par Svetlana Pavlenko Lun 8 Aoû - 7:52


J'étais une gamine qui crevait d'amour. (#1 - Nose Candy.) Eyes13
Blow-Yay-Diesel-White-RocketFuel-Powder-NoseCandy-Yayo-SnowWhite-Coke-Dust.




#1 - Nose Candy.

Dans la pénombre d'une chambre de All Saints, le bip régulier et constant du cardiogramme rythmait le silence religieux de la chambre 201 de l'hôpital. Illuminé par les infimes lueurs du soleil, un homme en blouse blanche assit près du lit, remplissait soigneusement les cases vides de son carnet.
Un étrange mélange de sentiments froissaient les traits de son visage tantôt animé par l'incompréhension, tantôt par la peine.

- Mademoiselle Pavlenko, je ne comprend pas, une fois de plus, les raisons pour lesquelles vous en êtes arrivée à visiter de nouveau ce lit d'hôpital.
Pourtant, ce n'est pas comme si l'on ne vous avaient jamais prévenu et que vous ne saviez pas, nous avons beaucoup de mal à vous imaginer supporter une fois de plus, une telle intervention.
- Docteur McCormac, avec tout le respect que je vous dois, vous êtes loin de vous douter des démons et des problèmes qui vous tombent dessus quand vous prenez de la coke, vous allez me répondre qu'il suffit simplement d'arrêter, mais ce n'est pas si simple, de plus, ce n'est pas faute d'avoir essayé.
Laissez-moi vous dire ceci.
La cocaïne est  obtenue à partir de la plante de coca. Par un procédé spécifique, on extrait de la plante, la cocaïne même que l'on raffine ensuite pour en faire une poudre.
Bien qu'on se la représente sous forme de poudre, à l'achat, elle est un peu grumeleuse, car elle provient d'un bloc.
La cocaïne peut être mélangée avec du verre  ou avec un abrasif pour brûler le nez du cocaïnomane lors du premier sniff afin qu'il devienne insensible et ne sente plus ce qu'il prend.
Des gens de tout âge en prennent. Ce n'est pas réservé à une tranche d'âge.
Bien qu'elle soit réputée pour être chère, même des ados peuvent s'en acheter.
Quand la personne en devient accro, les prix grimpent vu qu'il lui en faut plus. Et cela peut nous amener à des sommes astronomiques.
Il y a de nombreuses façons d'en prendre. Vous pouvez la sniffer, la fumer, vous pouvez même vous l'injecter avec une seringue.
J'avais 17 ans lorsque j'ai pris pour la première fois de la cocaïne, une trace, une ligne. -En allant à des soirées avec des copains-
J'étais avec des amis qui prenaient un malin plaisir à se défoncer. -Pour rigoler-
Une vraie panoplie de toxico animait ces soirées là, ils dégainaient chacun leurs belles trouvailles psychotropes : ça allait du champignon hallucinogène au gaz hilarant, que de l'ecstasy à la coke, ils fumaient tous du hasch comme l'oxygène qui alimentaient leurs poumons et on se soûlaient tous à coup de vodka bon marché.
C'était en quelques sortes une manière à bien à eux de s'émanciper de l'autorité parentale. Moi-même, je m'étais prise au jeu.
Au début, je fréquentais ces soirées pour me marrer, pour des anniversaires par exemple, il y avait des types plus âgés qui avaient de la cocaïne.
Bien sûr les plus âgés étaient cool, ils faisaient la teuf et se droguaient.
Je me trouvais au beau milieu de ces gens intelligents et friqués.
La cocaïne avait soudainement fait partie du tableau assez fréquemment.
C'était en fait une soirée pour se droguer.
J'en prenais au début une fois par mois, puis ensuite j'en prenais de plus en plus régulièrement.
En l'espace de huit mois. J'avais d'abord essayé à cette soirée-là, et puis celle-là. J'ai finis par en prendre chaque semaine, puis tout les jours.
J'en suis même devenue dealer.
Quand vous commencez, vous vous sentez comme une star, invincible, vous pensez que rien ne peut vous arriver.
Vous devenez plus communicatif, plus heureux et ouvert d'esprit.
Mais ça ne dure tout au plus qu'une demi-heure. La première fois je voulais en reprendre toute la nuit.
Avec la coke, c'est immédiat. Cela ne dure que 20 minutes. Après, vous devez sniffer une autre ligne. Il m'en fallait davantage.
Vous recherchez cette euphorie constamment sans jamais l'atteindre.
J'allais en racheter tout le temps. Je travaillais jusqu'à douze heures par jour.
Ma famille ne me voyait plus, mais ce n'était pas un problème, ils ne se souciaient déjà plus de moi.
Je rentrais tard le soir, je m'enfermais dans ma chambre pour préparer les ventes du lendemain et me faire plus de fric.
Je ne sais pas ce qui m'avait pris de faire ça, mais j'avais commencé à en prendre plus pour continuer à bosser plus longtemps et gagner plus d'argent...
Mais au final, toute ma thune y passait.
C'était si cher que j'en prenais juste assez pour ne pas griller tout mon budget.
Mais un jour, je suis tombée à court de coke et d'argent et c'est là que j'ai réalisé que c'était la cocaïne qui me contrôlait.
À force, je devais en prendre davantage pour me sentir normale. Mais on ne peux être -normal- sous l'emprise d'une drogue.
Mauvaises décisions sur mauvaises décisions, j'étais fauchée.
C'était à ce moment-là que j'ai découvert les pires moments de ma vie.
Je ne pouvais pas finir ce que je faisais : je n'arrivais pas à tenir une conversation censée et réfléchie ou regarder quelqu'un en face sans avoir des réactions exagérées et imprévisibles.
Des tics à la con, passant par des moments de déprime intenses ou des excès de colère incontrôlées.
À une soirée, j'étais allée trop loin, j'avais frappé une fille. Je l'avais battue jusqu'à qu'elle perde connaissance.
Tout ça pourquoi? Parce que je ne la connaissais pas. J'étais devenue parano.
Sans cette dope, je me sentais vulnérable, à bout d'nerfs, incapable et bonne à rien.
Le manque psychologique était bien là. Le besoin physique un peu moins, mais grandissait au fil des prises.
Plus j'en prenais, moins bien j'allais. Mais je ne pouvais pas arrêter. Du moins, je n'en trouvais pas la force.
C'était comme les sables mouvants. Une fois qu'elle vous tiennent, vous vous enfoncez.
Et plus vous essayez de vous en tirer, pire cela devient.
Si je n'en avais pas au réveil, je pensais à me brûler la cervelle.
Je pensais qu'il m'en fallait pour me lever, pour aller au lit, pour tout et n'importe quoi.
Quand, j'étais vraiment à sec et passées quelques jours sans, mes muscles devenaient douloureux, mes sinus étaient terriblement irrités, mon nez  se mettait à saigner.
Mon nez me faisait si mal que je ne pouvais pas dormir sans en avoir à portée de main.
J'en prenais régulièrement pendant la nuit pour anesthésier la douleur.
J'avais des bouffées de chaleur extrêmes et je suais abondamment la nuit. Je ne trouvais pas le sommeil.
En somme, un sommeil réparateur.
-Les frissons, les tremblements- Je prenais tellement de cocaïne que j'avais des hallucinations.
Quelques fois, je m'asseyais là et je me parlais à moi-même, je devenais folle.
Hallucinations, paranoïa, dépression, tentatives de suicide.
Je suis passée d'une drogue récréative avec des amis à une drogue qui me clouait dans une pièce obscure, seule et effrayée.

À l'époque j'économisais ce que je gagnais en dealant pour consommer, tout allait bien.
Jusqu'au jour où ce salaire ne me suffisait plus.
De plus, à la maison, ce n'était pas là où je pouvais trouver de l'aide pour mon addiction.
Ma mère me maltraitait, mon beau-père me battait et abusait de moi depuis mon plus jeune âge.
Eux-même étaient toxicos, violents et alcooliques.
La misère affective, la précarité sociale et la peur m'ont poussés à fuguer.
J'ai croisé des rabatteurs, des types trop sympas pour être honnêtes mais je ne me doutais de rien.
J'avais 19 ans, j'étais une gamine qui crevait d'amour, je voulais refaire ma vie.
C'était à ce moment-là que je m'étais fait des "amis"; des recruteurs pour un réseau de proxénètes.
L'un d'entre eux était tellement séduisant, il s'occupait si bien de moi... Enfin quelqu'un pour qui j'existais! J'étais sous le charme.
Une femme du groupe s'était comportée comme une mère, elle me bichonnait, je ne pouvais rien lui refuser.
Le jour où elle m'a demandé de montrer mes nibards à un type contre un billet, j'étais choquée.
Mais j'aurais tout fait pour garder son affection.
C'était comme ça que, de fil en aiguille, sans m'en rendre compte que je m'étais retrouvée dans la rue à tapiner, surveillée nuit et jour.
Perdue et désorientée, j'avais confondu naïvement l'attention d'une mère maquerelle avec l'amour d'une mère qui m'avait tant manqué.
En plus de ça, ce fric me permettait de me payer ce dont j'avais besoin : mes doses. La cocaïne. Ma cocaïne.
Je ne pouvais pas arrêter. La boucle était bouclée.
J'étais entrée dans une logique infernale. J'avais fait la morte dans l'inceste paternel, j'ai continué dans la prostitution.
Et ma vie de prostituée n'a fait que renforcer ma honte d'exister. Je me sentais sale et dégueulasse. Je prenais ces rails pour oublier.
Pour moi, la honte était partout : honte d'être une victime d'inceste, honte d'être une prostituée, honte d'être celle que j'étais devenue.
La prostitution, je le vis comme une suite de viols, en me demandant comment tous ces hommes peuvent défiler sans se poser de question.
Et pas un seul ne s'est inquiété de ma détresse.
S'ils payent, c'est pour ça; pour acheter le droit de ne se soucier que d'eux-mêmes.
J'étais mineure, déglinguée, et pas un sous, jamais, quelqu'un n'a manifesté le moindre intérêt pour moi.
On est une "pute", donc on est là pour ça. Ils viennent pour dégazer, un peu comme les navires poubelle.
Mais, il faut l'avouer, même si j'étais tombée un jour sur un client bienveillant, j'aurais menti, comme on le fait toutes: "je suis majeure, tout va bien, j'ai choisi".
Ce qui se passe avec une prostituée est à la limite du soutenable.
Quand on paye pour disposer du corps d'une femme, c'est tout sauf de l'amour et la violence est toujours là.
“Puisqu'on paye, on fait ce qu'on veut.”
On supporte l'insupportable sans pouvoir hurler de douleur. Pire, on doit faire semblant d'aimer ça... quand on en a encore la force.
Il faut absolument leur faire croire qu'on aime ça, ne serait-ce que pour tenter de repousser leur violence, qui peut surgir à tout moment.
Et puis franchement, est-ce à ces hommes que nous irions nous confier?
On a trop honte, trop peur; moi, mon proxénète n'était jamais très loin.
Les clients aiment bien dire que dans la prostitution, tout est clair.
Mais c'est une imposture. Il n'y a que de la tromperie, que du mensonge.
Le pire dans tout ça, c'est que j'ai continué à cause de ce cocktail explosif cocaïné, je n'arrivais pas à m'arrêter.
Un jour, je me suis piquée et j'ai manquée la veine. C'est allé dans un nerf. Mon bras et ma main se sont mis à enfler.
Mon bras enflait de plus en plus.
La ligne de mon cardiogramme ne bougeait plus.
L'équipe médicale d'urgence a accouru, ils ont appliqués les électrodes à ma poitrine pour me ramener à la vie.
J'ai cru que j'allais mourir.
Et vous voyez le pire dans tout ça ? J'ai recommencé à tapiner et à en reprendre une fois sortie de l'hôpital...
Je ne suis qu'une idiote.

Je ne suis plus  aussi heureuse qu'avant.
Ma mémoire n'est plus ce qu'elle était.
J'ai du mal à me souvenir des noms, des visages, de tout et de rien.
Mon corps aussi est déglingué, la chatte défoncée, les cernes et les rides témoignent de mon passé douloureux.
Pendant un an, ma jambe a été engourdie, car c'est là que je me piquais. Mon pied en souffre encore.
Cela a aussi abîmé mon bras et mes veines.
Quand je me mouche, j'ai encore du sang qui sort. J'ai eu un ulcère avec complications, palpitations, hémorragie, rien de bon.
Quand on est jeune, on se dit : "J'essayerais n'importe quoi. -Je vais essayer. Je vais en prendre."
Mais ça n'en vaut pas la peine.
Je regrette tellement d'avoir commencé.
Tout ça pour se sentir libre, je l'ai même perdu dans la foulée cette fameuse liberté.
Tout ça pour essayer et de me faire accepter, je n'arrive même plus aujourd'hui à me regarder dans la glace.
Tout ça au détriment de mes amis qui en ont souffert atrocement, aujourd'hui, je n'ai même plus personne avec qui discuter.

Qui dans ce monde voudrait garder contact avec une vulgaire chienne qui suce des queues, bonne qu'à se défoncer ?
Si vous pensez pouvoir en être maître, détrompez-vous. Vous devenez accro plus vite que vous ne le croyez.
Et, je ne connais personne qui ait pris de la cocaïne une seule fois sans en avoir souffert.
Cela peut sembler fun sur le moment, mais les vieux camés, ça n'existe pas.
Et ça, c'est la dure réalité Docteur McCormac, de désillusions en désillusions, je reviendrais probablement ici.
Mais cette fois-là, ce sera ma dernière visite puisque la raison sera différente et définitive.




Dernière édition par Svetlana Pavlenko le Ven 13 Jan - 4:17, édité 3 fois
Svetlana Pavlenko
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Message par Pablo_Aguass Lun 8 Aoû - 13:33

Propre, trés bien écris Very Happy
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Message par Shaun Strickland Jeu 11 Aoû - 14:43

Très très bonne présentation, rien à dire BG. Continue.

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Message par Svetlana Pavlenko Jeu 15 Déc - 23:54

Come back
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Message par Emilie Redfield Ven 16 Déc - 7:33

Ton texte à une portée particulière. La lancinante chaîne rythmée de tes phrases ne nous laisse pas le temps de respirer. On y trouve une dépendance ... Une dépendance aux proportions même que ce qui est décrit dans cette petite oeuvre.
Tu m'impressionnes.
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Message par Johnny Schreiber Ven 16 Déc - 11:20

Propre, comme je te l'ai déjà dit. Très bon rythme, très bonne qualité d'écriture. Je veux une suite.
Johnny Schreiber
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Message par Twix Ven 16 Déc - 14:51

Svetlana Pavlenko a écrit:Come back
Welcome back ma couille !
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