G. Ashton : No way out from madness [AWARDS #2] Chapitre IV : I Betrayed my Blood (first part)

Introduction

« Soit on meurt en héros, soit on vit assez longtemps pour se voir endosser le rôle du méchant. »

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« J'ai vu des centaines d'hommes mourir par folie et tomber dans leur ultime souffle.
J'ai sentis les convulsions de leurs femmes implorants dans mon dos le retour des déchus
J'ai goûté leurs litres de sang, fruits de mes sacrifices, offrandes pour l'ordre et la justice.
J'ai touché les multitudes de corps, froids comme la mort, solides comme la pierre.
J'ai entendu les derniers battements de ton cœur, avant qu'il ne sombre dans les ténèbres, à jamais.
La Vie.
La Mort.
Les Sens.
Ou est la frontière ?
La vie n'a-t-elle aucun sens ? De la naissance a la déchéance, tous sont composés de cinq sens. Mais jamais ces sens ne m'empêchent de prendre la vie. Suis-je la mort ? La mort ne réfléchi pas, la mort est le temps, la mort est la finalité. Je ne suis pas la mort car je sais que mon temps viendra, je sais que ma vie rompra pour me plonger dans le précipice obscur du coma inconscient, comme toutes les autres que je prends. Ma finalité n'est pas de donner la mort. Ma finalité est de protéger la vie. Pourtant je prend la vie. Et ne l'a rend pas. Car je n'en ai pas le pouvoir.
Pouvoir.
Le pouvoir est tout. Que serait le pouvoir sans la vie ? Grâce à mon pouvoir, la vie cesse d'exister. Le pouvoir n'est rien. Que serait ma vie sans le pouvoir ? Guère plus que la vie des autres, la vie que je prend. Ai-je le pouvoir de rendre la vie ? Non. Ai-je le pouvoir de protéger la vie ? Non. Je n'ai que le pouvoir de prendre la vie. Je ne suis qu'un messager du désespoir. Je ne suis que le cinquième cavalier de l’apocalypse. J'engloutis, je dévore, je brûle l'espoir, pour ne laisser place qu'à la souffrance.
Souffrance.
Ma vie n'est qu'une lancinante plainte. Je n'ai que peu de repos, pas de répit. Pourtant je n'ai pas encore embrassé la mort.
Amour.
L'amour galvanise l'homme. Douce ironie que l'ambivalence de ce terme. L'amour a deux faces. L'amour construit, l'amour ravage. L'amour est chérit, l'amour est volage. L'amour est créateur de vie, une passerelle vers l'impossible. Mais est-ce l'amour qui fait vivre ? L'amour survit-il dans la mort ? Tous sont nés par amour, et par amour certains sont morts. Je peux vivre par amour, l'amour fait battre mon cœur, l'amour me donne la force et le pouvoir, l'amour me donne une finalité, celle de vivre. Mais si il n'y a plus d'amour... Alors voilà la mort. L'amour, la mort.
En dépit de l'amour, je sème la mort. Par amour je vis. Par ma vie la mort naît. Par la mort, l'amour cesse d'exister. Je suis un briseur de vie, un instigateur de mort, pourtant j'ai le pouvoir, mais aussi la souffrance. Ma vie a-t-elle un sens ?
Je ne suis pas un criminel, bien que mes actes soient discutables sur le plan moral. Je n'agit pas dans mon intérêt mais bel et bien pour celui de tous. Je n'aime pas ce que je fais et pourtant j'y suis obligé pour l'Ordre, l'Honneur, la Justice et la Nation.
J'ai toutes les caractéristiques du Méchant, et pourtant je suis considéré comme un Héros. Voilà donc un autre paradoxe de notre société. »

Chapitre I : Sunday Bloody Sunday

Spoiler:

« Il faut se méfier du patriotisme car les instincts meurtriers dorment au coeur de chaque nation. »

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« Tonnerre. Pluie. Des éclairs de lumière illuminent l'espace de quelques instants le ciel nuageux de Belfast, en Irlande du Nord, le fracas de leur éclatement sur le sol Irlandais résonne à des lieux à la ronde tel le martèlement lourd de canons de feu crachant le plomb. Nous sommes un dimanche après-midi de 1997. Le temps est habituel. Il n'est pas rare de ne rencontrer que brume et humidité en Irlande. Tout le monde s'y est fait, après-tout. Tout le monde s'y est fait, comme la présence omniprésente de l'armée Britannique, et la tête de la Reine d'Angleterre sur les pièces de monnaie. Tout le monde s'y est fait...

Les rues sont désertes. Nous sommes dimanche. L'équipe nationale de rugby à XV Irlandaise rencontre l'équipe nationale d'Angleterre. Tout le monde est chez-soi à regarder le match, bière en main. Après tout, il n'y a que par le sport que les deux Irlande sont réunies de-nouveau et peuvent mettre en échec l'envahisseur Anglais. Il n'y a que par le sport que les Irlandais du Nord peuvent se sentir réellement fiers, libres de leurs convictions, sans l'oppression Anglaise. Faire la guerre ? C'est fini, trop brutal, cela coûte trop cher, et ils savent qu'ils n'ont aucune chance.

Dans cette ville fantôme balayée par la pluie, une berline noire roule et traverse quartiers et quartiers telle une balle lancée à pleine vitesse. La route est glissante. La circulation inexistante. La conduite semble pourtant délicate, mais pas pour le chauffeur. Très vite, la voiture se retrouve en périphérie de la capitale de l'Irlande du Nord. Le véhicule finit par s'immobiliser sur un terrain vague, abrité du vent par un vétuste mur de pierre faisant le tour de la propriété. Au centre de ce terrain vague, un entrepôt fait de taules grises, datant lui aussi d'un autre temps, probablement les vestiges de la seconde Industrialisation qu'a connu le Royaume-Uni.

Trois des quatre portières du véhicule s'ouvrent alors. Dans un geste presque coordonné, trois hommes entièrement vêtus de noir sortent de la voiture avant de faire claquer leur portière. Plutôt bien habillés, ils ont l'air d'hommes d'affaire sans valise. Long manteau descendant jusqu'aux cuisses, entrouvert et laissant voir une chemise de soie à col anglais, orné d'une cravate noire, pour tous les trois. Coiffés et rasés proprement, leurs cheveux sont tenus par du gel et ils laissent une odeur de parfum dans leur sillage. Tous de carrure correcte, ils dégagent un charisme certain. Le conducteur, environ la quarantaine, le visage dur, brun, les yeux marrons, une moustache bien taillée au-dessus de la bouche, dévisage tour à tour ses compagnons. Il fixe d'abord son copilote de l'autre côté de la voiture, lui, blond, un petit sourire moqueur et arrogant sur le visage, semble plus jeune que son homologue, quoique pas de beaucoup. Enfin, le conducteur dévisage l'homme derrière-lui, bâtant des cils à cause de la pluie battante. L'homme est le plus petit des trois, mais aussi le plus jeune. Brun, yeux bleus, il fixe le sol boueux, la tête légèrement inclinée sur le côté. Son aîné s'avance pour déposer sa main droite sur son épaule.

« On y va. »

Les trois hommes se mettent en marche, avançant vers l'usine décontaminée au centre de leur parking de fortune. Ils ne se pressent pas pour atteindre la porte et échapper aux gouttelettes d'eau qui glissent le long de leurs cheveux, de leur visage, de leur cou. L'aîné, le conducteur, est devant, suivit du blondinet. Tous les trois atteignent le porche qui renferme l'entrée de l'entrepôt.

« On entre sans bruit. Évitons d'alerter la populace. » murmure le conducteur de la berline en un souffle.
« Nous ne dirons rien, McRoy. Pas un mot. Et puis, ils n'auront le temps d'entendre quoi que ce soit. » lui répond le blondinet dans un accent très british.
« Pas d'humour avec ça, Ammis. Pas le moment de rire. » rétorque McRoy en fixant le blondinet d'un regard noir.

McRoy, c'était le nom du conducteur de la voiture. Du plus vieux des trois. C'est lui qui poussa d'une main la grille d'entrée de l'entrepôt. Ammis était l'homme aux cheveux d'or, il suivit McRoy à l'intérieur de l'entrepôt. Enfin, le dernier et cadet des trois pénétra dans la bâtisse, le visage dégoulinant de goutte d'eau de plus, telles des larmes. Car la tension était palpable. Le visage grave des trois inconnus en était la preuve. Tous les trois savaient ou ils allaient.

Il n'y avait que le silence, dans l'entrepôt. L'intérieur était faiblement éclairé par les lueurs du crépuscule tombant, filtrant à travers des fenêtres de verre brisés par le temps et le vandalisme. Les éclairs de l'orage illuminaient par moment l'intérieur du bâtiment, tout comme le visage blafard des trois ombres inconnues. Une odeur de poussière et d'huile de moteur emplissait l'air. Après quelques secondes d'adaptation, les Trois se mirent en mouvement. Ce qu'ils virent autour d'eux : des caisses, pleines ou non, renversées, détruites, poussiéreuses et repoussantes. Leur contenu était tout aussi insalubre, tout comme celui des rayonnages qui formaient plusieurs longs couloirs distincts à l'intérieur de l'entrepôt.

C'était comme si personne n'était venu ici depuis des années. Rien ne bougeait, le silence en était même pesant. Les seuls bruits que l'on pouvait entendre, c'étaient les bruits de pas sur la dalle sale du bâtiment, et la respiration la plus étouffée possible des trois compères. Ils étaient menés par McRoy, le plus vieux, suivit par Ammis, le blond, puis enfin le jeune du groupe. Classés comme une hiérarchie, presque par expérience, le plus assuré était celui qui prenait la tête, le plus apeuré se contentait de rester derrière.

McRoy les conduisait à travers le dédale formé par les vieux rayonnages dressés dans le complexe, ils traversèrent ce qui ressemblait à une vieille salle de stockage, bifurquant par une ouverture dans le mur qui débouchait vers un long corridor plongé dans la pénombre. Évidemment, il était possible d'éclairer le couloir, l'usine n'étant pas privée d'électricité, mais la discrétion était de mise. On ne devait pas savoir qu'ils étaient là. Pas encore. Les Britanniques avancèrent, toujours en file indienne dans le corridor obscur et poussiéreux. Ils marchaient lentement, à tâtons, leur main droite longeant le mur.

Au-dessus de leur tête, le plafond de l'entrepôt délaissé par le temps était criblé de toiles d'araignée. Voilà près d'une minute que les trois hommes suivaient ce couloir, avançant à pas de loup. Une minute, que c'est court. Pourtant, les battements du cœur des Anglais étaient presque perceptibles dans le silence du bâtiment. La tension montait d'un cran. Ils se rapprochaient, ils le savaient, ils n'étaient plus très loin. Cette minute leur parut longue, ils voulaient en finir, au plus vite. Ils avaient une mission, une éminente mission. Mais l'éminence traite bien trop souvent avec le danger. Ils le savaient tous les trois, ils n'étaient pas là pour une visite de courtoisie.

Les gouttelettes d'eau de pluie ruisselaient le long de leur visage, avant de tomber sur leur manteau de cuir, noir comme la mort. Elles terminaient leur chemin sur le sol, et étaient l'unique preuve éphémère de leur passage dans l'usine désaffectée. Mais au-milieu de la pluie, on pourrait penser discerner des larmes, chez le plus jeune. Ses traits froncés lui donnaient un air déterminé mais il allait de soit qu'il n'était pas dans son assiette. Qu'est-ce qui lui traversait l'esprit à cet instant précis. Nul ne le sait, mais il y a fort à parier que la peur lui noue la gorge. Pourtant il avance, pas à pas, suivant Ammis dans le silence et dans l'ombre, vers l'inconnu, et peut-être la mort.

Un tintement de métal se fit entendre. Les trois s’arrêtèrent immédiatement. McRoy se pencha vers l'avant, et dans son gant sombre se saisit d'une petite pièce de métal qu'il fit rouler entre ses doigts, l'approchant de son visage pour mieux en discerner les contours dans l'obscurité. L'objet était un long boîtier recourbé d'une quinzaine de centimètres. McRoy se pencha de nouveau pour le déposer sur le côté, et en se redressant il se retourna vers ses camarades.

«  Chargeur d'AK47. On a tapé à la bonne porte. Que Dieu nous protège.  »

Alors les Trois avancèrent encore dans leur corridor. Enfin, ils arrivèrent devant une porte de bois pourri, close, derrière laquelle émanait une douce lumière chaleureuse. Pourtant, ce n'est pas de la chaleur que ressentirent les trois hommes lorsque leur regard se leva presque au même instant vers ce qui surmontait la porte. Là, greffé dans le mur par quatre pieux d'acier, était exposé un drapeau tricolore Irlandais, qui comportait l'inscription « IRA, Irish Republican Army ». McRoy tourna de-nouveau la tête vers ses compagnons, leur faisant un bref signe. Tout trois plongèrent leur main droite dans leur long manteau de cuir, laissant entre-voir des gilets pare-balle, et tout trois se saisirent d'un Glock muni d'un silencieux qu'ils extirpèrent de holster, dissimulés dans leur longue cape. McRoy colla son oreille contre la porte de bois miteux, ses yeux étaient rivés sur le cadet du groupe, qui se tenait droit, l'arme tenue en main droite, le canon en direction du sol.

« Je les entends. N'aies crainte gamin. Tout va bien se passer. »

Alors McRoy poussa la porte en levant son arme vers le premier homme qu'il voyait. Et il pressa la détente.
…


«  Vas-y petit. C'est à toi de leur dire. C'est à toi. Pour ta première. »

McRoy tendait sa main droite en direction de son camarade, il tenait un petit combiné de la taille d'un téléphone miniature. La téléphonie mobile n'était pas aussi évoluée qu'aujourd'hui, mais c'était suffisant pour passer des appels. Le jeune cadet composa un numéro, tellement vite qu'il était impossible de déceler les chiffres qui le composaient. Approchant le téléphone de son oreille, il n'attendit pas d'entendre quelqu'un décrocher pour énoncer d'une voix intelligible :

« Nationalistes déchus. L’Irlande du Nord, restera Anglaise. Longue vie à la reine. »
«  Incendiez l'entrepôt. Nous ne voulons aucune trace. Bon travail Crayven. »

La réponse put être entendue des trois. Crayven raccrocha, puis laissa tomber le téléphone sur le sol, avant de l'écraser d'un coup de semelle.
Gregory se tourna, jetant une dernière fois un regard aux quatre cadavres sur le sol. Ces quatre hommes qui n'avaient eu le temps de réagir, et qui étaient déjà morts. Ces quatre hommes, morts pour s'être battu pour leur pays, tués par ses propres mains.

C'est alors qu'il l'aperçut. Un Irlandais, qui dormait, assit contre le sol. Tenant contre lui une bouteille d'alcool. McRoy suivit le regard de Crayven, et vit à son tour l'ivrogne. Se tournant vers Gregory, il lui lança d'un air glacial.

«  Tu sais ce qu'il te reste à faire, petit. »

Gregory fixa l'Irlandais sans défense. Le jeune Anglais avec les sourcils froncés, il le devait, pour son honneur, pour son pays. Il le devait, et pourtant si il le faisait, il commettait un acte des plus odieux, s'attaquer à un homme sans défense. Il ne pouvait. Pourtant son bras droit se leva lentement dans la direction du dormeur, il tenait son arme fermement, l'index posé sur la gâchette.

« Fait-le Gregory. Il ne sentira rien. Il dort. Il ne se réveillera pas. »

Quel cruel dilemme. Il n'en avait envie, mais il le fallait. Ces mots retentissaient dans sa tête. Jamais il ne se réveillerait, il ne verrait pas l'aube. De toute façon, il devait mourir. Alors, le corps tremblant, le cœur palpitant à tout rompre...

« Fait-le. »

...il tira.
...


Dans l'entrepôt, le silence avait regagné son droit.

Ce jour, l'équipe de Rugby d'Angleterre disposa facilement de l'équipe Irlandaise. »