S. Svensson : A man returned from the depths.

Chapitre I : L'AUBE

Après un voyage harassant, dans un engin dont le confort des sièges n'a d'égal que les célèbres tapis à clous, Sigvard foulait enfin le bitume de Los Santos.
Affublé d'une grossière chemise en coton parsemée de tâches à la provenance douteuse, le Suédois se dirigeait vers la carroussel à bagages déjà pris d'assaut par ses nombreux compagnons de voyage. Alors qu'il attendait sagement qu'un centimètre de terrain ne se libère, il repensait à la discussion que sa vieille mère lui avait tenue.
Après moult péripéties, Sigvard pouvait enfin admirer le ciel saturé de la ville. Loin d'imaginer ce qui l'attendrait plus tard, il extirpa son antique téléphone et composa le numéro d'une agence de taxis. Celui-ci arrivé, il chargea ses valises dans le coffre et grimpa à son arrière. Bien que le conducteur tentait d'amorcer la conversation, le Suédois restait muet en continuant de zieuter les alentours par sa fenêtre. Arrivé à son hôtel, il posa ses lourdes valises au sol sans même prendre le soin de ranger ses affaires. Pris de fatigue, il se vautra dans son lit douillet prêt à entamer une excellente nuit de sommeil.

Dans un repos des plus profonds, Sigvard rêvait de sa vie d'antan. Enfant, sa mère lui montrait souvent des photographies de Boden, sa ville natale. Il venait de rentrer de son premier et, visiblement, dernier voyage dont il garde un goût particulièrement amer.
Il s'en souvenait de sa maman qu'il chérissait tant. Contraint de quitter Princeton, il avait dû la laisser seule. C'était une brave femme, dévouée pour son mari et son unique fils. Soucieuse des traditions, elle l'avait élevé en bon protestant bien qu'elle ne cautionnait, elle-même, cette religion. Sigvard n'était pas bien difficile : d'un tempérament calme, il s'exécutait sans rechigner à la tâche. Il n'a jamais vécu dans le pays d'origine de ses parents mais se considère, néanmoins, comme un véritable Suédois.

La bruyante sonnerie de son réveil retentissant, le jeune homme se redressa avant de jeter un regard foudroyant sur la valise toujours posée au sol et dont il fallait, encore, ranger le contenu.

Chapitre II : DOUTES

Installé depuis maintenant quelques semaines, Sigvard avait eu le temps de s'acclimater à l'atmosphère urbaine qui était, maintenant, propice aux affaires. Lui qui, jusque là, n'avait tenté que de petits coups avec ses compagnons d'infortune se retrouvait propulsé à la tête d'une équipe dont la charge s'avérait particulièrement complexe.
Londres, ville de débauche, fut la témoin privilégiée des prémices d'un homme qui aspirait à devenir quelqu'un, du moins c'était ce qu'espérait celui qu'on prénommait maintenant Sig'. Était-il ambitieux ? Assurément, non. Voyait-il le long et sinueux chemin de la marginalité dressé devant lui ? Il en était conscient mais préférait se voiler la face. La réalité en est tellement plus simple ainsi...
Émergeant de ses profondes pensées, le Suédois pila, de justesse, à un feu tricolore avant de reprendre la route à bord de sa vrombissante voiture qui lui avait été confiée moyennant l'oublie de "quelques dettes".

Rentré dans sa vétuste planque, Sigvard s'engouffra dans ce qui lui servait de cuisine afin de rassasier son estomac criant famine. Non sans moues et soupirs, il s'efforçait de finir sa tambouille malgré l'immondice de cette dernière. L'heure du repas constituait en un véritable rituel : tout était codifié, de la première bouchée à la vaisselle. Cuillère à la main, le Suédois replongea dans ses pensées. Pourquoi se remémorait-il son premier casse ? Pourquoi culpabilisait-il ? Pourquoi pensait-il à sa mère ?
Toujours plus de questions mais jamais aucune réponse. Faisait-il le bien ? Le Suédois se refusait toujours à porter atteinte à quelqu'un. Aucun crime de sang n'avait été commis de sa main. Il appelait souvent sa religieuse pour prendre de ses nouvelles, mais était-il un homme bon pour autant ?

Fatigué de sa réflexion, il s'allongea sur son canapé-lit puis laissa le sommeil le gagner.

Réservé.